Arnaud Daubasse

Arnaud DAUBASSE (Moissac 1657 – Villeneuve-sur-Lot 1720).
daubasse1Arnaud Daubasse naquit à Moissac le 2 octobre 1657 ; son acte de baptême figure dans le registre paroissial de l’église Sainte Catherine (AMM GG 36). D’origine modeste, il se définit comme « mèstre penchenièr en còrna que non sap legir ni escriure » (maître en fabrication de peignes en corne qui ne sait, ni lire ni écrire). Ce sont donc ses admirateurs qui ont recueilli ses poésies en français et en occitan, car Daubasse excella dans les deux langues. Il a chanté l’amour, le bon vin, mais aussi la morale et les noëls. Il fut un troubadour tardif allant de castel en castel : chez le duc de Biron, le comte de Fumel, Montaigne, le marquis de Belzance…
Un jour qu’il avait tendu aimablement la main à Madame de Rigoulières pour l’aider à franchir un ruisseau sur une planche, il lui adressa le quatrain suivant :
« Vos sètz bèla coma lo jorn
jamai la nèu serà tant blanca
Per passar lo riu de l’amor
non voldriái pas d’autra palanca ».
Ce que l’on peut traduire non sans sacrifier quelque rigueur : « Vous qui êtes belle comme le jour/jamais neige ne sera aussi blanche/Pour franchir le ruisseau de l’amour/je ne voudrais d’autre passerelle. »
A une jeune fille qui l’avait éconduit après lui avoir promis sa main et qui, s’étant mariée, lui envoya le lendemain de son mariage, les feuilles de son bouquet, Daubasse décocha le refrain suivant, dans lequel la méchanceté du poète est à la hauteur de la sottise de la jeune dame : « Faut-il que ton perfide cœur/livre de ton amour un présent si funeste ?/ Après m’avoir donné ta fleur/tu ne pouvais avoir que des feuilles de reste. »
A un gentilhomme grossier et impatient, il improvisa ces dix vers :
« Perdonaretz ben, monsenhur
un paure artisan, un penhur
de vos aver fait atendre.
Mès, n’ai pas pogut me defendre
d’aquela banda de paisans
que non pòdon, chès los marchands
a lor parlar metre de bòrnas.
Venètz per me crompar de còrnas ?
Anatz vos sans vos inquietar,
Deman vos ne’n faràn portar ! »
que l’on peut entendre diminués de quelque charme : « Vous pardonnerez bien, monseigneur/un pauvre artisan, un peigneur/de vous avoir fait attendre/ mais je n’ai pu me défendre/de cette bande de paysans/qui ne peuvent, chez les marchands/à leurs propos mettre des bornes./Vous venez pour m’acheter des cornes ?/Partez sans vous inquiéter,/demain ils vous en feront porter. »
L’œuvre occitane d’Arnaud Daubasse est particulièrement intéressante et nous fournit la preuve qu’aux 17e et 18e siècles l’occitan est la langue spontanée et constante du peuple des villes comme des campagnes.
   René  Pautal